__Ci-dessous, le texte de son intervention au conseil communal du 5 juillet__
»Cette intervention pour confirmer l’information que beaucoup d’entre vous connaissent, à savoir que cette séance est pour moi la dernière en tant que conseiller communal.. J’officialiserai ma démission auprès du secrétaire communal durant cet été et vous aurez le plaisir de retrouver en septembre Annie Richard comme conseillère Ecolo.
Il ne faut y voir aucun désaccord avec mon parti –dont je resterai d’ailleurs un militant attentif et actif- mais uniquement une décision mûrie de longue date et dont la locale Ecolo de Forest est informée depuis longtemps. Plus précisément, en souhaitant figurer en fin de liste lors des élections d’octobre, j’avais clairement indiqué ne plus avoir l’intention de siéger. L’heureux résultat de ces élections en a décidé autrement. Ayant, comme en 2000, coordonné la campagne électorale d’Ecolo et aussi ensuite les négociations avec le PS, les circonstances ont fait que j’ai finalement accepté de siéger 6 mois, le temps que cette majorité – que j’appelais tant de mes vœux- se mette en place dans toutes ses composantes. C’est à présent chose faite et, malgré l’insistance de quelques amis, je tiendrai donc mon engagement (..) »
Les raisons qui ont guidé cette décision sont strictement personnelles : elles sont au nombre de deux et complémentaires
-D’une part, mon métier d’enseignant-chercheur à la Faculté Polytechnique de Mons–qui me passionne mais m’absorbe tant- va connaître l’année académique prochaine une nouvelle phase. Le FNRS m’accorde une année sabbatique pour accomplir une mission scientifique et j’entends m’y consacrer entièrement. Encore plus que par le passé, je serai amené à séjourner à l’étranger et tout cela me paraît incompatible avec une responsabilité bien assumée de conseiller communal.
– L’autre raison, bien différente, est que je suis un militant politique actif à Forest depuis 40 ans. Beaucoup d’entre vous le savent, j’ai d’abord animé de 70 à 90, la section de Forest du PCB, notamment en étant candidat aux élections de 70, 76, 82 et 88. Ensuite, après une pause d’adhésion politique de 7 ans, j’ai rejoint, il y a 10 ans, Ecolo lorsque ce parti est sorti, de ce que Vladimir Illitch aurait appelé sa maladie infantile, du « ni gauche, ni droite ».
Car en ce qui me concerne, mes racines familiales, éducatives et culturelles plongent profondément dans ce que Mitterand appelait « le peuple de gauche ». A l’instar d’Obélix, je suis tombé dans cette marmite très jeune, déjà un peu actif durant mes études secondaires, encore plus à l’ULB, avec en finale l’expérience enrichissante d’un an de délégué étudiant au CA de l’ULB, juste après mai 68.
Mais j’ai toujours eu une vision très idéaliste, très morale de la politique, fortement influencé par la philosophie existentialiste de Sartre. Pour moi, qui suis profondément athée, ce qui donne un sens à la vie et procure un accomplissement personnel, c’est le choix de l’engagement, que seule me dicte ma conscience, et cela indépendamment du « regard des autres ».
Mes balises personnelles ont donc été toutes les grandes mobilisations de solidarité internationale qui ont émaillé les années 60, 70 et 80, mais aussi les luttes sociales, notamment au travers de mon adhésion constante à la FGTB. J’ai donc été imprégné des valeurs de solidarité, de fraternité et d’égalité qui ont été au cœur de l’histoire de la gauche dans la deuxième moitié du XXième siècle. Ces valeurs restent pour moi d’une frappante actualité, même si, « le monde et les temps changent » pour reprendre une phrase de Bob Dylan.
Et effectivement en 40 ans, les conditions géo-politiques (en particulier avec l’épuisement historique de ce que certains appelaient le modèle socialiste), les conditions sociologiques (en particulier avec la perte de substance de la classe ouvrière) et les conditions économiques (en particulier avec la mondialisation des échanges), toutes ces conditions ont été fortement modifiées. Mais aussi, et on n’en a pas encore mesuré toute l’importance, avec l’apparition du paradigme écologique qui s’impose avec de plus en plus de force quant à l’avenir de nos sociétés, à l’utilisation des ressources limitées de la terre, aux conséquences des activités humaines sur la biosphère et le climat, posant avec acuité le problème du développement durable et nous imposant de nous interroger sur les répercussions de nos choix économiques « aujourd’hui et demain, ici et ailleurs ».
Pour moi, c’est dans la symbiose d’une part de ces valeurs historiques et d’autre part de ces nombreux défis, que la gauche trouvera son avenir.
Aussi, à l’échelle de notre microcosme forestois, je ne pouvais rêver mieux que le contexte de cette nouvelle majorité « PS-Ecolo » pour mettre fin à mon mandat de conseiller communal. Je lui dis « bon vent » et dis à ses membres, prenez le temps –au-delà des tâches quotidiennes absorbantes- de mesurer vos grandes décisions et orientations à l’aune des enjeux sociaux et écologiques, n’ayez crainte de l’audace et de l’innovation. Sortez des sentiers battus. Alors, j’en suis convaincu, votre nouvelle majorité sera utile à la population forestoise et c’est en tout cas ce que je vous souhaite.
Jacques Teghem