Françoise Vogeleer est architecte. Axel Reding est entrepreneur en rénovation. Pour associer leurs talents, ils ont fondé la société FRAXION. Ensemble, ils vont rénover un ancien entrepôt forestois, rue du Monténégro. Ils y installeront leurs bureaux. Le bâtiment sera basse énergie. De jeunes créateurs y seront aussi accueillis. Entretien.
Une architecte et un entrepreneur, ça fonctionne ?
Françoise : Mais oui ! Nous apprenons des choses l’un de l’autre, souvent dans la confrontation d’idées. Axel m’apporte son expérience technique et son pragmatisme…
Axel : Françoise m’apporte l’innovation artistique et… le « rêve écologique ».
D’où vient votre projet ?
Françoise : Nous avions besoin d’espace, d’abord pour notre activité, mais aussi pour nous mettre en synergie avec d’autres professionnels. Six personnes, architectes ou graphistes, vont pouvoir travailler dans nos locaux. Nous accueillerons aussi des évènements culturels (expositions, projections, théâtre…).
Nous voulons un projet phare dans le quartier : par la rénovation écologique, mais aussi par la fédération des talents, en créant une « plateforme de compétences ». Et nous aimerions faire école !
Pourquoi avoir choisi ce bâtiment ?
Axel : Cet entrepôt centenaire nous a vraiment tapé dans l’œil. Sa façade en pignon est d’ailleurs répertoriée sur une liste de sauvegarde du patrimoine. Le rez-de-chaussée servira au stockage des matériaux pour mon entreprise de rénovation ; le premier étage (un plateau libre avec une petite cour intérieure) sera loué ; la mezzanine servira d’espace commun de détente et de réunion, et accueillera nos propres bureaux.
Pourquoi avoir choisi de rénover en basse énergie, et pas en passif ?
Françoise : Nous voulions rénover en passif, mais notre bureau d’étude nous l’a déconseillé. Plusieurs critères sont défavorables :
- la configuration du bâtiment ne s’y prête pas (compacité) ;
- la diminution importante du volume exploitable suite à l’ indispensable et importante isolation ;
- le surcoût de l’investissment ;
- l’utilsation du bâtiment (va-et-vient des personnes).
Nous avons donc opté pour la basse énergie, qui reste une solution énergétiquement remarquable. Nous aimerions atteindre 45kWh/m²/an. Alors, une chaudière de moins de 5kW suffira pour chauffer l’entièreté des bureaux.
Axel : pour l’isolation, nous allons recréer une nouvelle enveloppe dans le bâtiment. Nous allons intégralement doubler les parois avec une structure bois, puis l’isoler en y injectant de la cellulose.
Donc pas de produits chimiques ?
Axel : Nous allons limiter au maximum l’impact environnemental, et aménager un espace de travail aussi sain que possible. Nous emploierons des matériaux qui ont peu d’impact sur la santé… L’idée est d’être cohérent dans le choix des matériaux.
Allez-vous utiliser l’énergie solaire ?
Axel : Hélas non, parce que l’ensoleillement de la toiture est trop faible.
Françoise : Nous avons cependant déjà installé une citerne d’eau de pluie de 6 500 litres, avec une filtration végétale. Elle assurera la distribution des eaux sanitaires pour les WC. Récupérer l’eau de pluie, avec une telle surface de toit, c’est vraiment le minimum.
Pour vous, l’écologie c’est évident ?
Axel : Vous savez, quand en 1985 en sortant de l’école en tant que conducteur de chantier, on jetait sans tri presque tous les matériaux dans le « container crasse ». Et dans ma formation, on parlait peu d’isolation ! Donc j’ai vraiment vu une évolution formidable, dans le bon sens. Et Françoise m’a transmis sa sensibilité environnementale.
Françoise : Mais tu sais, dans mon école d’architecture, il n’y avait qu’un prof qui nous parlait de développement durable. Et c’était pourtant en 2001 !
Comment s’est déroulée la procédure ?
Françoise : Notre projet ne nécessite pas de procédure particulière. Les difficultés sont d’ordre technique, nous essayons de concilier l’impact environnemental et nos objectifs personnels.
Axel : Je dois dire que le service d’urbanisme de Forest a été coopérant, surtout grâce à l’agréable collaboration avec l’architecte communal Bruno Nys.
Avez-vous bénéficié de primes ?
Françoise : Oui, mais c’est un sacré combat ! C’est complexe, et il faut des dossiers en béton. Il faut aussi savoir quelles primes préférer. D’ailleurs, c’est un bureau spécialisé qui gère l’ensemble des demandes de primes.
Axel : On croit a priori à ce système, même si on regrette qu’il faille souvent avancer l’argent avant de toucher la prime.
Avez-vous pensé à figurer parmi les « bâtiments exemplaires » de Bruxelles – Environnement ?
Axel : Oui, pourquoi pas. Ce serait une bonne vitrine.
Vous êtes impatients alors ?
Françoise : Oui ! Nous emménageons ce mois de décembre… mais rien ne sera vraiment fini.
Axel : En attendant, on s’est construit au premier étage une « boîte dans la boîte », à partir de matériaux récupérés sur mes chantiers ! Nous y travaillerons cet hiver. Ça va être une expérience !
Vous nous inviterez à la pendaison de crémaillère ?
Axel et Françoise : Ben oui, bien sûr !
> Propos recueillis par François Jourde et Tina Noiret
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